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blog non officiel de Nicolas Sarkozy
23 avril 2007

Gérard Courtois : "Nicolas Sarkozy est en position de force, mais il n'a pas gagné"

source:le monde
L'intégralité du débat avec Gérard Courtois, directeur éditorial au Monde., dimanche 22 avril 2007

Sandrine : Comment peut-on expliquer ce taux de participation particulièrement élevé ?

Gérard Courtois : Le taux de participation est presque record. On retrouve pratiquement le taux de participation de 1974 et de 1965.
Cette année, 38 millions de Français à peu près ont été voter, contre 29 millions seulement en 2002.


Pourquoi ? Depuis le début de cette campagne, tout démontre l'intérêt des Français pour cette élection. Les nouveaux inscrits beaucoup plus nombreux - presque 3,5 millions en cinq ans -, l'audience des grandes émissions de télévision, les ventes des journaux et l'affluence aux meetings de tous les candidats.

Il y a deux raisons fondamentales qui expliquent cela. La première est le souvenir du 21 avril 2002. Les Français n'avaient pas envie, à l'évidence, de revivre ce scénario.

La deuxième raison est que l'offre politique des candidats cette année marque un changement de génération politique. On tourne la page Chirac-Mitterrand, qui a dominé la vie politique depuis 30 ans, et les principaux candidats (Sarkozy, Royal et Bayrou) sont tous des responsables d'une cinquantaine d'années, qui apparaissent comme des leaders politiques nouveaux.

Gégé : Sarkozy a-t-il réellement récupéré les voix du FN ? Ne peut-on pas considérer que les voix du FN sont restées stables par rapport à 2002 et que l'augmentation de la participation a fait baisser le pourcentage des voix du FN ?

Gérard Courtois : C'est en partie vrai, mais seulement en partie. Si l'on prend le total de l'extrême droite en 2002 : Mégret + Le Pen, ils avaient obtenu 5,5 millions de voix.

Sur la base des estimations actuelles, Le Pen aurait obtenu 4,2 millions de voix, c'est-à-dire qu'entre 2002 et 2005, l'extrême droite a perdu 1,3 million de voix.

Donc la stratégie de Sarkozy a été payante quoi qu'on en pense sur le fond. D'un strict point de vue électoral, il a stoppé la progression de l'extrême droite et il l'a fait reculer pour la première fois depuis 1988.

alane : La gauche sort-elle affaiblie de ce premier tour ?

Gérard Courtois : C'est une question compliquée. Si l'on prend l'ensemble de la gauche avec l'extrême gauche, elle recueillait 42 % des voix en 2002, elle n'en recueille plus que 37 %.

Inversement, la candidate du Parti socialiste progresse de 10 points par rapport à Lionel Jospin, et elle réalise un meilleur score que François Mitterrand au premier tour de 1981. Donc, globalement la gauche est plus faible, mais le PS beaucoup plus fort.

L'autre point important, c'est qu'en 2002, la gauche de gouvernement était dispersée. Elle est presque entièrement rassemblée cette année autour de Ségolène Royal, avec deux situations extrêmement difficiles pour le Parti communiste français qui tombe à 2 %, c'est-à-dire une quasi-disparition, et les Verts, avec Dominique Voynet, à 1,5 %, c'est-à-dire son plus mauvais résultat depuis une douzaine d'années.

Naudar : Bayrou, faiseur de roi ?

Gérard Courtois : Le résultat le plus évident du scrutin, c'est la repolarisation autour du débat droite-gauche. Le candidat de l'UMP, avec 30 % des voix, réalise un score supérieur de 10 points à celui de Jacques Chirac en 1988, 1995 et 2002. De l'autre côté, la candidate socialiste réalise également le meilleur score de son camp depuis 1988. Donc il y a bien une bataille de second tour entre la gauche et la droite.

Mais c'est vrai que François Bayrou a réussi une grande partie de son pari. Avec plus de 18 %, il a attiré sur son nom plus de 7 millions d'électeurs, qui seront les arbitres du second tour.

La question qui se pose pour François Bayrou est, on l'a bien vu dans sa déclaration ce soir, de ne pas donner l'impression de se rallier ni à la gauche ni à la droite. S'il se rallie, toute sa démarche tombe à l'eau. Pour rester indépendant, il va devoir résister aux pressions des socialistes et de Sarkozy. Mon sentiment est que Bayrou ne donnera pas de consigne de vote, et qu'il prépare dès à présent l'élection présidentielle de 2012.

Claire : Les 7 millions d'électeurs qui ont voté Bayrou vont-ils plus se tourner vers Royal ou Sarkozy ?

Gérard Courtois : Un, c'est la grande inconnue du second tour. Deuxième constat : puisque les extrêmes ont perdu beaucoup de poids, aussi bien l'extrême gauche que l'extrême droite, la bataille va se jouer au centre.

On l'a bien vu ce soir lors des premiers débats télévisés. Les responsables socialistes martèlent que Nicolas Sarkozy est le représentant du gouvernement sortant, que Bayrou dénonçait. A l'inverse, les responsables de l'UMP ont souligné que l'UDF de François Bayrou avait les mêmes idées et les mêmes valeurs que Nicolas Sarkozy.

Donc il est clair que les deux candidats du second tour vont essayer de convaincre les 7 millions d'électeurs de Bayrou qu'ils sont les meilleurs candidats pour la rénovation de la politique Française qu'ils attendent.

Enfin, toutes les enquêtes, jusqu'à présent, sur les électeurs qui avaient l'intention de voter pour Bayrou, démontraient qu'une proportion importante vient de la gauche, et a été déçue par les positions du PS et la campagne de Ségolène Royal.

L'enjeu du second tour est de savoir si la gauche réussira à convaincre ce centre gauche qui cherchait une solution à son attente dans le vote Bayrou.

niconiconico : Assiste-t-on ce soir à la fin du FN en même temps qu'à la fin de la carrière de Jean-Marie Le Pen ?

Gérard Courtois : La fin de carrière de Jean-Marie Le Pen, cela me paraît une évidence. Il suffit pour s'en convaincre d'avoir écouté son intervention dès 8 h 15, qui était un peu dérisoire, et qui ne témoignait plus de sa pugnacité habituelle.

Gérard Courtois : "Nicolas Sarkozy est en position de force, mais il n'a pas gagné"
LEMONDE.FR | 20.04.07 | 14h58  •  Mis à jour le 22.04.07 | 23h35

L'intégralité du débat avec Gérard Courtois, directeur éditorial au Monde., dimanche 22 avril 2007
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Quant au FN, il est probable que les mois à venir vont être très agités dans le parti d'extrême droite. Les cadres les plus anciens vont certainement reprocher à Marine Le Pen d'avoir cherché à adoucir l'image du FN, et lui feront porter la responsabilité de l'OPA réussie par Sarkozy. On peut donc s'attendre à un sérieux conflit sur la succession de Le Pen et sur le positionnement de ce parti.


Dernier point : Marine Le Pen a souligné ce soir que l'on assistait à la victoire des idées de Le Pen, aussi bien à travers le vote anti-système de Bayrou qu'à travers les positions de Sarkozy. Cela n'est pas faux. La France de 2007 est très nettement ancrée à droite.

Reste enfin à savoir comment se comporteront les électeurs du Front national. Soit ils prolongeront l'hémorragie vers Sarkozy, soit ils voudront "se venger" et feront tout pour empêcher Sarkozy de l'emporter. Il sera important d'écouter ce que Jean-Marie Le Pen dira à ses électeurs le 1er mai.

Kalaf : Les "petits candidats" de gauche (dont le rôle avait été tant discuté en 2002) sont en net retrait (pas un seul ne dépasse les 5 % des voix). Cela peut-il marquer la fin de mouvements comme les Verts ou le PCF ? Parallèlement, Olivier Besancenot et la LCR peuvent-ils s'imposer à leur place ?

Gérard Courtois : Est-ce la fin du PCF ? Oui, mais cela n'est pas nouveau. Le PCF était il y a 30 ans le premier parti de gauche. Il est tombé à 16 % en 1981, à 6 % en 1995, à 3 % en 2002, et il disparaît aujourd'hui pratiquement de la carte nationale. C'est donc bien l'agonie de ce parti.

Sa seule planche de salut repose maintenant sur ses élus, mais que ce soit aux législatives du mois de juin ou lors des municipales de l'an prochain, son sort est presque entièrement entre les mains du Parti socialiste. C'est le PS qui peut maintenir le Parti communiste sous perfusion.

Du côté des Verts, cette élection marque une nouvelle fois leur incapacité à construire une force politique capable d'exprimer les inquiétudes et les attentes des Français en matière d'écologie. Quatre mois après le succès du Pacte écologique de Nicolas Hulot, Dominique Voynet et les Verts n'ont pratiquement rien su conserver de cet élan. Plus encore que pour le PC, les Verts ne peuvent espérer occuper une place si la gauche l'emporte que par la grâce du Parti socialiste.

J'ajoute, concernant l'extrême gauche, que le seul qui tire son épingle du jeu est Olivier Besancenot. Comment aurait-on pu imaginer il y a encore dix ans que le candidat de la Ligue communiste révolutionnaire ferait un score deux fois supérieur à celui du PCF ? Je pense que Besancenot peut demain être le fédérateur d'une extrême gauche qui n'a pas su tirer profit du "non" au référendum européen de 2005.

Boby : C'est plié ou c'est ouvert pour le second tour ?

Gérard Courtois : La campagne du second tour a commencé ce soir. Elle sera évidemment très différente de celle du premier.

Nicolas Sarkozy est ce soir en position de force, mais il n'a pas gagné. Pour y parvenir, il lui faudra combattre le front anti-Sarko qui s'est dessiné dès ce soir avec le refus de Philippe de Villiers d'appeler à voter pour lui, et l'attitude aussi bien de François Bayrou que de Jean-Marie Le Pen, qui ressemble à tout sauf à un ralliement.

Inversement, Ségolène Royal aura besoin pour l'emporter de rassembler très au-delà de la gauche. L'ensemble de la gauche pèse ce soir 37 %. Pour gagner le 6 mai, il faudrait qu'elle entraîne sur son nom plus de la moitié de l'électorat de Bayrou et, il faut le dire comme tel, une partie de l'électorat d'extrême droite qui serait prête à tout pour barrer la route à Sarkozy. C'est un pari extrêmement difficile, mais qui n'est pas impossible.

Depuis un an, en dépit de toutes les critiques et de toutes les attaques, Ségolène Royal a déjoué tous les pronostics. Elle a été désignée en novembre dès le premier tour de la consultation des militants socialistes avec un score que personne n'attendait, et elle a réalisé ce soir, avec selon les dernières estimations, 26 %, un résultat inespéré pour les socialistes.

Donc c'est assez ouvert.

Philippe : La participation restera-t-elle aussi forte au second tour ?

Gérard Courtois : Je pense que la participation sera de même ampleur. Il va y avoir un vrai débat entre deux projets, deux personnalités très marquées. Et je serais très surpris qu'après s'être déplacés en masse le 22 avril, les électeurs n'aillent pas jusqu'au bout du match entre Sarkozy et Royal.

Je pense enfin qu'il y aura autant d'incertitudes pendant ces quinze jours à venir qu'il y en a eu avant le premier tour, car l'attitude des électeurs de Bayrou et des électeurs du Front national va peser comme un très gros point d'interrogation sur le résultat du 6 mai.

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